J'assume
! Quel
jeu jouez-vous ? Il
faudrait être responsables ! Alcool... Echecs
au bac : responsabilité partagée ! "Fraternité"
calédonienne ? Raciste
? Qu'en
pense-t-Il ? "Je
n'ai rien entendu" ! Sorcellerie
et magie
N° 79 fin décembre 1981
LE PASSEUR
Au congélateur
Une bonne nouvelle pour certains : je mets le PASSEUR au congélateur.
Dans ce dernier numéro, je tiens d'abord à M'EXCUSER auprès de tous ceux que j'estime et qui ont été choqués par mes réflexions. Parfois, il ont cru que, parce que leur analyse ne collait pas à la mienne, je ne pouvais être le pasteur auquel ils pensaient avoir droit.
Qu'ils sachent que nos divergences d'analyse, que les mains qui se sont retirées devant ma main tendue, que le froid qui s'est parfois établi entre nous... n'ont jamais entamé l'amitié et l'estime que je leur porte.
JE NE RENIE RIEN cependant de ce que j'ai pu écrire : je crois même qu'il était nécessaire que quelqu'un dise ce que j'ai pu dire. Le PASSEUR a peut-être donné à ma voix une résonance inattendue. Elle voulait être "une voix" dans le concert de l'Eglise, une réflexion parmi d'autres... et elle s'est trouvée à résonner, seule, dans le silence !
Une réflexion isolée ne peut être une réflexion "d'Eglise", une voix isolée ne peut être la voix de l'Eglise... Elle pourrait par contre lui faire oublier son "absence" dans l'effort général d'appréhension des difficultés que traversent les hommes de ce Territoire : c'est pourquoi j'ai décidé de me taire. Mais ni mon cerveau, ni mon coeur n'iront - eux -au congélateur, soyez-en bien persuadés !
N° 79 fin décembre 1981
LE PASSEUR
Quel jeu jouez-vous ?
Quelques-uns ont trouvé que je parlais trop des mélanésiens, de leurs aspirations, etc... Ils ont pris ça "assez mal", comme une prise de parti contre eux.
Leur réaction est normale... parce qu'elle est humaine. Ils réagissent comme le fils aîné, en Luc 15, 25, qui a de la peine à admettre ce que le Père fait pour son jeune frère. Ou encore comme cet ouvrier en colère qui, en Matthieu 20, 12, se fait répondre par le Maître de la vigne : "Mon ami, je ne te fais aucun tort. Est-ce qu'il ne m'est pas permis de faire ce que je veux en ce qui me regarde ? Ou vois-tu de mauvais oeil que je sois bon ?"
Montrer sa sympathie aux uns ne veut pas dire que l'on n'aime pas les autres, et aider les uns ne veut pas dire travailler contre les autres ! Au contraire, tout ce qui est fait pour que le mélanésien soit "bien dans sa peau" ne peut qu'être positif pour ceux qui sont appelés à travailler toute leur vie avec eux !
Si l'on doit reconnaître que la colonisation a apporté une ouverture certaine au monde mélanésien... il faut bien reconnaître aussi qu'elle l'a complètement déstructuré aussi bien au niveau du tissu social qu'à celui de l'individu. Et c'est grave.
Aujourd'hui, ce monde essaie de se restructurer, de se réorganiser, de se reprendre en main. Même si ça nous dérange, il faut bien reconnaître - objectivement - que c'est un bien pour lui. Et ce qui est un bien doit être encouragé. C'est pour cela que je soutiens l'effort de désaliénation, dans la mesure où il n'est pas cause d'aliénation pour d'autres.
- "En tant que prêtre, vous devez rester en dehors de tout ça"
Je ne suis pas tout à fait d'accord ! L'Eglise a apporté un bien inestimable à la Calédonie : l'Evangile. Mais aussi, parce que c'était l'esprit du temps, l'Eglise a contribué à la déstructuration de la personnalité et de la société mélanésiennes.
Le prêtre, souvent, au nom du "nouveau Dieu", s'est emparé de tous les pouvoirs. La cloche de la Mission a remplacé les toutoutes des chefferies.
Par l'école, la Mission a enlevé les enfants à leurs premiers éducateurs : leurs parents. Ils étaient séparés de leur famille, de la coutume; ils apprenaient des choses que les vieux ne savaient pas. Les pôles de référence traditionnels : les vieux, la tribu, la coutume étaient remplacés par "la manière pour les blancs". La Mission a voulu aider le mélanésien à "prendre son envol". Mais ça a été fait si vite, si radicalement... que ça a été comme un jeune plant qu'on arrache du sol pour le repiquer : si on n'amène pas le terreau nourricier avec les racines, le plant aura de la peine à reprendre.
Un retournement s'est fait aujourd'hui, grâce aux jeunes que la Mission a conduit jusqu'aux études universitaires. Et je crois que l'Eglise, aujourd'hui, doit s'engager d'une façon volontariste pour aider à restructurer ce que, hier, bien involontairement, elle a contribuer à déstructurer.
Ça explique mon attitude en tant que prêtre
N° 79 fin décembre 1981
LE PASSEUR
à propos de l'alcool
Y en a qui disent...
Quelqu'un a dit à l'Assemblée Territoriale qu'on ne résoudrait le problème de l'alcoolisme en Calédonie qu'en supprimant le fait colonial. C'est aller un peu vite en besogne ! C'est simplement supprimer la responsabilité individuelle et réduire l'homme à l'état de marionnette !
Le propre de l'homme est au contraire sa capacité à réagir pour rester homme dans les situations les plus inhumaines. Camps de concentration, tortures, prison... ont souvent contribué à révéler aux hommes les capacités étonnantes qu'étaient les leurs, de dépasser ces conditions inhumaines et d'en sortir "grandi".
On serine trop aux gens que, s'ils boivent, c'est la faute au "fait colonial". En les dégageant de leur responsabilité on les aide à s'avilir, à descendre de plus en plus bas jusqu'à en faire des épaves... Au lieu de leur donner un idéal, de les appeler à réagir en homme, de montrer qu'ils sont capables de tenir tête aux situations les plus invraisemblables et de prendre en main leur avenir.
Excuser l'alcoolisme, c'est pousser à boire. Venant d'indépendantiste, c'est surprenant ! L'indépendance sera-t-elle acquise par des hommes lucides ayant barre sur les évènements, ou par une horde d'ivrognes qu'on enverrait au casse-pipe le moment venu ? S'il faut passer par là pour avoir l'indépendance... ! Quand le pillage de bars est présenté comme "soutien logistique" pour les barrages - comme ça a été fait à Canala - on peut se poser des questions.
Quelle indépendance préparent les élus qui, par leur attitude, favorisent chez leurs frères la dépendance la plus aliénante, celle de l'alcool ?
Y en a qui disent : "Vous savez, ils ne nous aiment pas ! il n'y a qu'à les entendre nous insulter quand ils sont saouls. Là, on sait ce qu'ils pensent vraiment !"
Je ne suis pas d'accord sur le fait que ce que dit un ivrogne serait ce qu'il pense vraiment. Simplement parce que l'alcool court-circuite la raison.
Je sais moi, que je ne me reconnais pas dans le F.X. qui a bu, mais dans celui qui a toute sa raison. Le F.X. qui a bu est le vrai F.X. ... MAIS privé de sa raison ! ... C'est un navire fou, privé de gouvernail... une épave !
Vous êtes différents de moi, vous ? Non ? Et pourquoi voudriez-vous que, chez les mélanésiens, la boisson révèle la vraie personnalité, alors que, chez nous, elle révèle un personnage en qui nous refusons catégoriquement de nous identifier ?
N° 79 fin décembre 1981
LE PASSEUR
Toujours à propos d'alcool
Le problème de l'alcool est un problème grave dont la solution semble nous échapper totalement. L'alcool, c'est la destruction de l'individu, de la famille, de la société... et c'est aussi un handicap pour l'avenir, car c'est une drogue dont on ne peut que difficilement se passer une fois qu'on s'y est accoutumé.
Il n'est pas facile de s'arrêter de boire parce que l'alcool crée un besoin dans l'organisme qui "réclame" après lui, mais aussi parce que l'alcool amoindrit la volonté. Et quand on n'a plus de volonté, comment résister à l'invitation à boire un coup... "rien qu'un coup"... !
Qu'est-ce qui pousse à boire ?
- l'ennui
- les soucis
- le désir de faire ce qu'on n'oserait pas faire si on n'avait un "coup dans l'aile"
- l'attraction des copains
Sans doute y a-t-il encore d'autres raisons, mais l'important n'est pas de trouver des "excuses". Chacun, individu ou collectivité, doit découvrir au contraire sa part de responsabilité dans ce drame de l'alcoolisme.
L'ennui, le désouvrement sont en partie dus au chômage... mais la perte d'un emploi est aussi parfois liée à l'abus de l'alcool ! On embauche de préférence quelqu'un de sérieux, "qui ne boit pas". Alors...
Le mélanésien préfère souvent travailler pour quelqu'un. Pourquoi ? Il ne maîtrise pas les circuits économiques. Il pourrait très bien produire, mais il ne saurait pas écouler ses produits. A quoi bon produire alors : il vaut mieux s'embaucher chez quelqu'un et toucher un salaire... et quand on n'arrive pas à se faire embaucher, on est perdu.
Les coopératives de production et de vente donneraient au mélanésien une raison de travailler car son travail deviendrait productif. Ça lui donnerait aussi une raison d'espérer en voyant qu'il peut maîtriser les circuits économiques, et qu'il n'est pas obligé de passer par l'employeur européen pour survivre.
Le travail n'a pas alors uniquement une valeur économique, mais une valeur humaine. Il devient "intéressant" de travailler. C'est une solution au problème du désoeuvrement qui conduit à l'alcool.
Des hommes se mettent à boire quand ils rencontrent trop de difficultés dans la vie et ne savent pas comment s'en sortir. La collectivité doit prendre conscience ici de sa responsabilité si elle laisse un homme seul au milieu de difficultés insurmontables par lui tout seul.
Mais la responsabilité de la collectivité ne supprime pas la responsabilité de l'individu. La boisson va-t-elle t'aider à résoudre les difficultés que tu traverses ? Non ! elle ne va que les multiplier... mais tu ne les verras plus, et c'est ça que tu cherches dans l'alcool. Drôle manière d'être "un homme" !
Le désoeuvrement qui conduit à l'alcoolisme a aussi une de ses origines dans une certaine absence de goût de vivre. Pour beaucoup, la vie qu'on leur propose n'a pas de saveur, pas d'intérêt. Il n'y a pas "d'espérance". La vie n'ayant pas de goût, on s'en évade par l'alcool.
Devenir responsable de son destin, l'indépendance,... tout cela redonnerait-il un certain goût de vivre ? Certainement.
Mais d'un autre côté, il faut bien se dire qu'on ne peut accorder l'indépendance qu'à un peuple capable de prendre sa destinée en main. Sinon ce serait la catastrophe. Alors..."Quand on sera indépendant on n'aura plus de raison de se saouler"... ou bien... "Pour pouvoir être indépendant, il faut commencer par ne plus se saouler" ?
On boit aussi pour montrer à l'autre qu'on n'a pas peur de lui. On peut - dans cet état - l'insulter, le menacer, "l'emmerder".
Si quelqu'un éprouve le besoin de boire pour pouvoir affirmer son égalité, c'est qu'on lui a fait sentir une infériorité avec laquelle il n'est pas d'accord.
"Reconnaissez la valeur de quelqu'un et il n'aura pas à chercher à prouver qu'il vaut quelque chose"... mais aussi : "Méritez l'estime et on vous estimera".
En Calédonie, contrairement à d'autres pays, l'alcoolisme est vu avec indulgence par la collectivité. Celle-ci, non seulement ne le réprouve pas, mais encore - souvent - elle le favorise. Elle crée des occasions de fête où il est tacitement convenu "qu'on vient se saouler".
Dans ces conditions, l'individu porté sur l'alcool ne trouve pas dans la personnalité collective du groupe le soutien nécessaire pour épauler sa personnalité individuelle défaillante. C'est dramatique pour une communauté qui vise l'indépendance.
Où est la solution ?
Chacun doit découvrir l'incapacité de l'alcool à résoudre ses problèmes, et doit - en lien avec ceux qui ont fait cette prise de conscience - créer un climat communautaire qui contribue à la disparition des beuveries organisées, et au soutien des volontés individuelles défaillantes.
N° 79 fin décembre 1981
LE PASSEUR
Echecs au bac
A l'occasion du faible pourcentage de réussite de mélanésiens au baccalauréat, le PALIKA dénonce l'inadaptation de l'enseignement.
Que l'enseignement soit inadapté, c'est un fait évident. Mais il y a une autre "évidence" qui frappe moins les yeux... c'est que le PALIKA doit bien être, pour une large part, responsable de ces échecs !
Comment ça ? Simplement en enlevant toute motivation aux jeunes par la critique systématique de "l'enseignement bourgeois", etc....
Je parierais bien volontiers que, malgré l'inadaptation évidente de l'enseignement, un kanak de droite réussit mieux qu'un kanak de gauche ! L'un est motivé, et cherche à prouver par sa réussite que ceux qui critiquent ont tort. L'autre n'est pas motivé du tout et, par son échec, s'efforce de démontrer que ses critiques, elles, sont motivées.
Pour les échecs scolaires, je partagerais donc largement la responsabilité entre l'inadaptation de l'enseignement... et la propagande politique !
Cette analyse est à rapprocher de celle faite à propos de l'alcoolisme, dont on fait porter le poids à la "situation coloniale", dégageant les individus de leur responsabilité. Cette politique ne me semble pas constructive.
N° 79 fin décembre 1981
LE PASSEUR
"Fraternité" calédonienne
...
Je ne voudrais pas mettre en doute la bonne volonté des organisateurs de la manifestation de Nouméa, mais...
Inviter toute la population à manifester son désir de fraternité et de vivre dans la paix "toutes ethnies confondues"... Nombreux sont les indépendantistes qui ont dû être tentés de se joindre à une telle manifestation.
... et puis - en fin de défilé - voilà qu'un manifeste est présenté au haussariat, indiquant que le rassemblement parle "au nom de la majorité silencieuse qui, au cours des deux derniers scrutins, a clairement exprimé son désir de maintenir la Calédonie dans la cadre de la République"...
Les vaches ! Ils vous disent qu'ils sont a-politiques; ils vous invitent à grossir leurs rangs pour manifester le désir de fraterniser... Et, une fois que vous êtes dans leurs rangs, que la TV et CORAIL vous ont filmés et photographiés sous toutes les coutures, qu'on vous a collé l'objectif sur le museau si vous étiez mélanésien, qu'on vous a compté et recompté ... vous apprenez que vous faîtes partie de ceux qui ont clairement exprimé leur désir de maintenir la Calédonie dans le cadre de la République !!!
Assez malhonnête comme procédé !
Les interviews télévisés étaient assez éloquents. Interrogés sur les raisons de leur présence à la manifestation, aucun participant n'a mentionné le mot "Fraternité" !
Tous étaient là pour exprimer leur désir "de vivre en paix avec tous". Il y a une marge entre la volonté de fraternisation et le souhait exprimé "qu'on nous laisse vivre en paix". Le premier mouvement est un mouvement positif qui implique un geste vers l'autre, une écoute plus grande, etc... L'autre mouvement est négatif, c'est un refus d'écoute : "Foutez-nous la paix, c'est tout ce qu'on demande. Vous pouvez bien faire tout ce que vous voulez, pourvu que ça ne nous dérange pas".
"Fraternité", oui, mais pas à cette sauce-là !
N° 79 fin décembre 1981
LE PASSEUR
Raciste ?
A mon goût, on parle un peu trop de "racisme" en Calédonie. A tort.
Si l'européen fréquente peu le mélanésien ( et recto-tono comme dirait Diogène ), est-ce parce qu'il est "raciste" ?
Il y a des gens avec lesquels il m'est difficile de discuter ( on est de mondes si différents, avec si peu de points communs ! ).
Il y a des gens avec lesquels je suis gêné, chez lesquels je ne tiens pas "à rester trop longtemps" ( ils ont des façons de manger, de dormir... d'être ensemble qui me sont tellement étrangères ! ).
Il y a des gens avec lesquels je refuse le dialogue ( ils ont un mode de raisonnement si totalement différent du mien que ça n'a jamais abouti à rien ). Etc. etc...
Cela veut-il dire que je sois raciste ? Pas forcément. Car ces difficultés de relation peuvent exister à l'intérieur d'une même ethnie, et être dues à la classe sociale, à l'éducation reçue, aux oppositions de caractère...
Il ne faut pas tout baptiser trop vite "racisme" !
Le restaurateur qui met à la porte quelqu'un qui dérange la clientèle n'est pas forcément raciste... il est "commerçant" et veille à son "bizness" ! Il agirait de même à quelqu'ethnie qu'appartienne le "perturbateur". Pour tout commerçant il y a les bons clients et les mauvais clients... le partage ne se fait pas par la couleur de la peau mais par la façon de se comporter.
Plutôt que de "racisme", parlons de "conflit de cultures".
On est modelé depuis notre plus jeune âge. Notre comportement social est modelé... On a des façons "d'être ensemble" différentes selon les cultures; ne serait-ce que la façon de "faire la fête" !
Un kanak qui, sur le plan culturel, comportement social... respecterait les usages européens, ne se verrait pas "mis à l'écart". Et il en va de même dans l'autre sens : un blanc n'est "supportable" en milieu mélanésien que dans la mesure où il accepte de "s'adapter"
Deux races, deux ethnies peuvent vivre ensemble... se sentir "frères".
Deux cultures ne peuvent pas "vivre ensemble". Il faut que l'une cède devant l'autre.
Plutôt que d'en rayer purement et simplement une de la carte, je crois qu'elles devraient apprendre à se faire des concessions mutuelles, selon les circonstances.
Evitons de provoquer les autres par notre comportement, efforçons-nous de respecter leur manière d'être... et nous n'aurons plus l'occasion de les traiter de "racistes".
N° 79 fin décembre 1981
LE PASSEUR
Qu'en pense le Christ ?
J'ai parfois l'impression douloureuse que nous avons éliminé Dieu du champ de nos préoccupations. On s'intéresse à l'Eglise, à la vie de la paroisse, on participe aux activités qu'elle propose... mais, dans notre comportement individuel ou collectif, quelle référence faisons-nous au Christ ?
Des gens qui font baptiser leurs enfants mais ne viennent jamais prier le dimanche... Que représente le baptême, que représente le Christ Sauveur pour eux ? Ils sacrifient à des habitudes d'Eglise mais ne cherchent pas le dialogue avec ce Dieu qui - seul - peut donner sa pleine dimension à l'homme.
Le catéchiste qui anime "sa liturgie", mais sème la zizanie entre les gens... Que représente le Christ pour lui ? Il est fidèle à un ministère d'Eglise, mais il n'est pas fidèle à Celui qui est la Tête de son Eglise.
Celui qui est très actif au plan paroissial mais qui, dans son engagement politique utilise le mensonge et piétine ses frères... S'il ne fait pas référence au Christ dans ses choix d'action, il n'est pas chrétien !
J'ai trop souvent l'impression que nous sommes des gens pleins de bonne volonté, que nous mettrions en quatre pour l'Eglise ... mais que nous nous contrefichons du Christ.
Il faut absolument remettre le Christ à sa place. Au coeur de notre vie. Il est le Sauveur. L'Eglise n'est qu'un corps mort si on en élimine le Christ.
En toute chose, posons-nous la question : "Qu'en pense le Christ ?". Qu'en tout il soit vraiment notre référence. Notre participation à la vie sociale de l'Eglise ne suffit pas, et ne débouche sur rien si le Christ n'est pas celui qui l'anime.
Ne cherchons pas tant à "faire marcher la paroisse" qu'à marcher humblement à la suite du Christ.
C'est vital.
N° 79 fin décembre 1981
LE PASSEUR
Les trois visages de la vocation
Quand on parle de vocation, on parle tout de suite "appel de Dieu". Mais cet appel peut prendre différentes formes.
- ça peut être un appel intérieur que nous sentons au fond de nous. Comme une force irrésistible qui nous pousse au service de Dieu et de nos frères. Rien d'autre ne compte vraiment devant ça.
- Ça peut être l'appel de la communauté. Celle-ci s'est réunie, a prié, réfléchi, discuté et te demande d'accepter d'être catéchiste par exemple. Même si cette idée ne t'avait pas effleuré, ne crois pas que ce ne soit pas là un appel de Dieu. Il t'appelle par l'intermédiaire de la communauté dont il est la Tête.
- Ça peut être aussi le prêtre ou le responsable des catéchistes qui vienne te trouver et te demander de t'engager. Si l'idée ne t'en était pas venue à l'esprit, et si ta communauté ne t'a jamais fait d'appel dans ce sens... ne crois pas que ce ne soit pas un appel de Dieu pour autant !
Refuser, ce n'est pas faire preuve d'humilité. C'est faire preuve d'égoïsme et de manque de foi. ... Mais si Dieu t'a appelé, c'est qu'Il sait qu'il peut vaincre cet égoïsme et ce manque de foi. Aussi, après ton NON initial, n'aie pas peur d'aller travailler à la Vigne : le Père t'y attend.
N° 79 fin décembre 1981
LE PASSEUR
quelques réflexions sur
La sorcellerie et la magie
Le fait que notre religion soit devenue de plus en plus "athée", sans référence directe au Christ, qu'elle se soit parfois réduite à un rite social... peut permettre à des "croyants" - en toute bonne conscience - de lier certaine pratique de sorcellerie à la pratique religieuse.
La sorcellerie est un appel à un pouvoir "sur-humain" dont peut me faire bénéficier une "puissance supérieure".
Quand je m'adresse à une telle puissance, je reconnais et implore son pouvoir. Son emprise ne va pas s'arrêter au cas particulier pour lequel j'ai fait acte de soumission : c'est le début d'un long esclavage, d'une destruction sournoise de mon "être" derrière la façade trompeuse du "paraître".
L'art du Malin est de faire croire à la "neutralité morale" de ma demande :
- "Tu as faim ? Demande que ces cailloux deviennent du pain"
- "Tu veux aller aux Hébrides ? Je peux te faire faire "le voyage"
La chose en soi n'est pas mauvaise, mais elle me met sous l'emprise du Mauvais qui va s'infiltrer peu à peu.
Il peut y avoir de "bonnes choses" qui me soient accordées par le Mauvais, pour me berner. Dans les Actes des Apôtres, au ch. 8, on voit que les gens croyaient que ce que faisait Simon le Magicien lui venait de Dieu !
Pourquoi faire appel au sorcier ? Pour répondre à des besoins personnels égoïstes ( vengeance, filtre d'amour, voyages... ) : le Mauvais est toujours là pour répondre à de telles demandes.
Les "voyages".
Le diacre Philippe en a fait l'expérience en Actes 8, 39-40 ... mais il n'y a pas que les "anges du Seigneur" à faire faire les voyages !
Être très méfiant :
- si c'est pour un but égoïste, ce ne peut être avec l'aide de Dieu
- parfois même, si c'est dans un but généreux, ce peut être le Mauvais qui m'accorde l'aide pour - après - m'avoir à sa merci.
Les "effets secondaires" de la fréquentation des sorciers sont subtils :
- perte du goût pour la prière et abandon de tout ce qui pourrait me mettre en relation avec Dieu.
- Attirance pour tout ce qui me replie sur moi ( sexualité désordonnée, alcool, drogue... )
- On reprend son indépendance vis-à-vis de la religion. Sentiment que les curés nous ont bernés jusqu'à ce jour. Relire à ce sujet Genèse 3.
- Un voile est jeté sur notre responsabilité : c'est toujours "la faute des autres" ! Relire à ce sujet Genèse 3, 11-13
D'une façon indéfinissable, ma vie va se dégrader :
- Répercussion sur le foyer ( l'amour est trop à l'image de Dieu pour que l'Adversaire ne cherche à s'y attaquer ! )
- Répercussion sur la vie matérielle ( souvent, on va "réussir" ). Le confort et la réussite font en effet souvent oublier Dieu. Et puis, voir des gens mauvais qui réussissent, ça fait s'interroger les gens honnêtes ( relire Ps 85, 14 ou 122, 4 ). Très bon tout ça pour le Malin !
- Répercussion sur le statut social : on est respecté, craint... ( alors que Jésus nous appelle à "servir" )
Bien voir les limites de ce que peuvent nous apporter les pratiques de sorcelleries :
- Une aide "temporaire" ( en fait, un mauvais service ! )
- Cette aide acquise entraîne un processus de soumission et de dégradation dont je ne puis être le maître.
Un seul remède : me tourner avec confiance vers Celui qui est le seul à avoir autorité sur ces puissances : le Christ ( Col. 2, 15 )
Que puis-je faire pour ceux qui ont pris "la mauvaise voie" ?
- Essayer de les éclairer... mais il est bien loin d'être évident que mon action débouche, à cause du Prince des Ténèbres ( "Ils ne croient pas que le dieu mauvais de ce monde a aveuglé leur intelligence Col. 4, 1-4 )
- Faire jouer la communion des saints : prière, offrande de mes propres combats
Des gens pensent parfois que c'est péché que de croire à toutes ces histoires là. Ils essaient alors de refouler dans leur inconscient cet "extraordinaire" inquiétant :
- Ce n'est pas un péché que d'admettre l'action de puissances mauvaises
- Ce serait par contre "péché" que d'en avoir peur, car ce serait douter que le Christ soit vainqueur des forces du mal
- Ce serait une erreur dangereuse que de nier l'action de puissances mauvaises.
Les boucans, "sacrements" du diable. Signes visibles d'une réalité invisible.
Lorsqu'un prêtre verse de l'eau sur le front d'un enfant, il montre par là, d'une façon visible, sa volonté et celle des parents d'en faire un enfant de Dieu. A la rigueur, on pourrait se passer d'eau ( baptême de désir ), comme on peut communier à Jésus-Christ par la communion de désir, sans passer par le signe visible des hosties consacrées.
De même, le sorcier, par le boucan, montre d'un signe visible sa volonté et celle de ses "clients" de faire du tort à quelqu'un. Mais comme ci-dessus, à la rigueur, il peut se passer de boucan pour faire du tort.
Comme ce n'est pas "l'eau" qui fait un enfant de Dieu, ce n'est pas non plus le "paquet de feuilles" qui porte du tort, mais les puissances auxquelles on s'est adressé.
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